[Quebec Movie, "In Cha
Allah" is one of the best western movies spoke about
the Palestine desperation
so please search for it and see it;
Auteur: Pierre Jasmin | Le
30 septembre 2012, 14h14
Synopsis : Obstétricienne québécoise
submergée par son travail dans une clinique des Nations-Unies en Cisjordanie
aux côtés d’un médecin français désabusé et vieillissant,Chloé, étouffée par la
chaleur et la poussière, y est accaparée journellement par une clientèle
hétéroclite de mères ados ou alors d’autres moins identifiables en niqab ou
tchador. La clinique, située dans un secteur soumis à des fouilles abusives de
soldats israéliens, est assiégée en permanence par des foules bruyantes
dominées par les fumées odorantes de motos et d’outils pétaradants. Les
enfants, lorsqu’ils ne deviennent pas des résistants martyrs en lançant des
roches et même parfois leurs pauvres petits corps contre des jeeps ou tanks
israéliens, cherchent obstinément des objets à récupérer dans un dépotoir
accoté au fameux mur. Au pied du mur, une exception ; un enfant solitaire
déguisé en Superman à la cape rouge loqueteuse qui ne trouve rien d’autre
à faire que d’y cogner tap-tap-tap des cailloux au lieu de les balancer à la
tête des soldats, comme ses camarades. Cet enfant est le frère du héros du film le
Sacrifice d’Andreï Tarkovsky, qui arrosait son arbre mort tous les jours
avec patience et ténacité comme le lui avait enseigné son père…
Sa journée finie, Chloé retraverse le check-point où
travaille son amie soldate israélienne Ava et l’accompagne, pour
oublier la dureté abrutissante de leur travail respectif, s’étourdir dans des
discothèques, l’alcool et la cigarette au bec, et des baises occasionnelles sur
une plage, non loin de Tel Aviv. Grâce à des moments de répit au téléphone skype avec
sa mère monoparentale qui vivant au bord du fleuve St-Laurent devine vaguement
son désarroi et grâce à une amitié naissante pour une palestinienne nommée Rand partageant
avec Ava le même rouge à lèvres cerise intense faisant ressortir leur beauté
méridionale, Chloé « équilibre » ainsi tant bien que mal sa vie, qui
dérape dès lors qu’elle rencontre de plus près le frère de Rand : ce
dernier l’entraîne dans la nuit palestinienne éclairée aux bougies ou aux feux
de bois clairsemés dans la magie de chants aux mélopées lancinantes. Elle
l’entraîne à son tour en expédition, avec sa famille entière sur les ruines de
leur village d’origine en territoire israélien, ce qui a l’heur de provoquer
des réactions opposées, selon l’intransigeance mâle ou l’appétit de bonheur
féminin (carpe diem) des individus qui la composent.
« TU ES DE TOUS LES CÔTÉS, DONC
TU N’ES D’AUCUN ».
Brutalement, son nouvel amant,
militant engagé, lui jette le reproche suivant, que l’observateur à la
recherche permanente d’un regard objectif de paix reçoit de plein fouet
aussi: « Tu es de tous les côtés, alors tu n’es d’aucun ». On
croirait entendre Pierre Falardeau, en dénonciation de la posture d’artiste
pour la paix que nous maintenons coûte que coûte, malgré les secousses d’un
dialogue tendu permanent : ou bien face à la guerre
israélo-palestinienne rester froid comme la justice et adopter l’objectivité d’un
regard sans larmes pour favoriser les pistes de paix (comme ma médiation tentée
l’été dernier entre deux camarades de Pugwash: l’ambassadeur iranien
à l’Agence internationale d’Énergie Atomique et un ex-dirigeant du Mossad
israélien), ou alors nous succombons à une compassion humaine pour des victimes
qui ne peuvent, qui ne doivent pas laisser insensibles des artistes vibrants
comme Daniel-Jean Primeau et Martin Duckworth allés de nombreuses fois à leur
rencontre. Et pourtant, je vous préviens que ma question sera perverse, la
compassion, réflexe de nombreux Québécois, ne serait-elle pas plus naturelle
aux Angloquébécois (comme le terroriste Richard Bain ?) minoritaires dans
un Québec entouré de pays anglophones de tous côtés, comme Israël est entouré
d’Arabes ? Perverse, parce qu’on ne peut absolument pas comparer le niveau
économico-politico-socio-culturel de ces deux « minorités »…
Bref, si on excepte des moments de
grâce comme la démarche commune des APLP avec l’ontarienne Margaret Atwood,
nous voilà aussi désemparés face à la question que l’héroïne du film :
comment réagirions-nous dans sa situation, sur l’émotion du moment ?
D’autant plus qu’elle est également confrontée par le constat d’Ava « ce
n’est pas ta guerre » qui résoudrait facilement son dilemme, notre
dilemme, en nous ramenant paisiblement (!) à notre confort-indifférence.
UN CHEF D’ŒUVRE SUSCITE PLUS DE
QUESTIONS QUE DE RÉPONSES
La violence s’excuse-t-elle ?
Non, mais elle s’explique : un personnage attachant du film meurt, tant
pis si ce n’était par la froide observation de son acte irréfléchi,
qu’ « un p’tit crisse », ou traduit par Chloé au médecin
français, « un p’tit con ». Et la cinéaste, plutôt que de capitaliser
sentimentalement comme l’auraient fait 99% des cinéastes sur les pleurs des
proches de l’enfant, zoome aussitôt sur une photocopieuse en couleurs
produisant implacablement à la chaîne la photo entourée de drapeaux
palestiniens du « martyr », bref sur l’instrumentalisation en
faveur de la Cause du décès du malheureux gosse.
Et voudrions-nous nous distancer d’un
tel fanatisme que nous viendraient à l’esprit les façons sans nuances de
certains de nos concitoyens
- d’amoindrir la bêtise de
manifestants masqués jetant des pierres aux policiers pendant le printemps
érable,
- de canoniser les frères Rose après
la Crise d’Octobre plutôt que de réfléchir à leur pourcentage de responsabilité
dans la défaite du dernier référendum,
- ou même de réagir, comme l’a fait
un éditorialiste de Vigile.net, en traitant M. Dorion de
« traître » parce qu’il remet en question la charte de la laïcité
endossée par Djemila Benhabib. Écoutez d’ailleurs la passionnante confrontation
Benhabib-Dorion à l’émission de Paul Arcand sur www.lautjournal.info : du grand journalisme
où chaque côté marque des points !
DES ACTRICES AU TALENT PEU COMMUN
N’est-il pas temps de rendre hommage à
Évelyne Brochu et aux deux autres membres du trio remarquable d’actrices, Sivan
Levy et Sabrina Ouazani, particulièrement cette scène d’accouchement inouïe
d’intensité, qui restera une immortelle pièce d’anthologie, près d’un check-point où
se joue un face à face mortel entre le frère de Rand et un jeune soldat
israélien qu’il cherche à amadouer en partageant avec lui « le talent
purement défensif de Puyol du Barça Football Club », et ainsi tenter de
lui faire oublier le contexte de guerre et le convaincre de laisser passer son
groupe vers l’hôpital?
Et pourtant, ces actrices pourront
difficilement gagner des prix, car même si elle exploite bien leur
extraordinaire talent, Anaïs Barbeau-Lavalette ne cherche nullement à les
mettre en valeur. Ce qui l’intéresse n’est pas la narration de destins humains
aussi admirablement scénarisée qu’Incendies de Mouawad-Villeneuve (qui le
pourrait ?) ; ce n’est pas non plus accompagner de son regard une
héroïne, comme le réussit avec une actrice-témoin exceptionnelle, Rachelle
Mwamza, Rebelle filmé au Congo par le courageux Kim Nguyen (dont le
film précédent, la Cité, était par contre à mon avis bien mieux ficelé);
Barbeau-Lavalette cherche – grâce à deux atouts majeurs dans sa quête, un décor
reconstitué fabuleux d’authenticité et le naturel des enfants du film qui
portent la lumière du futur -, à nous montrer la société à la manière d’un
documentaire, avec la poussière et le dénuement, les ânes et la crasse, la
machine implacable de guerre entre frères ennemis sur qui elle ne cherche
nullement à provoquer notre apitoiement, comme l’ont fait avec tant de
maladresse nombre de films moralisateurs ou carrément colonisateurs sur le
Moyen-Orient ayant atterri sur nos écrans depuis trois ans.
Il est urgent, à la suite de ce film
remarquable, de marginaliser un peu BHL avec ses additions intellectuelles
bancales, au profit de l’artiste cinéaste ABL qui procède au contraire par
soustraction : on a l’impression que le montage du film a coupé bien des
scènes pour arriver à cette épure. Le regard d’ABL ne cille pas, et, comme dans
son premier film le Ring, ne se laisse pas distraire par le human
interest (j’entends Falardeau ou Chartrand…) et son héroïne ne hurle
jamais, se gardant d’interférer avec notre émotion qui s’en trouve ainsi
décuplée. Des critiques peu clairvoyantes le lui ont reproché, alors
que le ressort épique de son film réussit, sans complaisance
hollywoodienne, à restituer dignement et parfois même, avec l’indignité nécessaire,
le tragique de la situation palestinienne.
P.J.
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